gone astray (bass)

Le visage couvert par des nuages de pensées, Letha assise à son bureau avec vue sur les vagues qui s’écrasent le long du port. Les bateaux couverts de voiles noires s’endorment alors que le jour arrive à sa fin. L’horizon laisse disparaître le soleil qui laisse passer ses derniers rayons. Pour l’été, le vacarme du soir écrase la musique du jour. L’eau ruisselle pour remplir le canal des soupirs et les visages s’éclairent en entendant les notes d’une nouvelle mélodie. Les peintures recouvrent les murs d’un espoir vivace et le maquillage commence à cacher les cauchemars de la veille. Dans le Queens tout se paye, et les Black Sails l’avaient compris peut-être plus que n’importe qui d’autre. Les promesses d’un temps devenaient dérisoires au fur et à mesure que l’argent disparaissait dans les banques d’un ami au double visage. Le patriarche lui avait appris que les erreurs se payaient un peu trop chères, et qu’un empire qui coule laisse toujours beaucoup trop de traces derrière lui.

On l’informe que quelqu’un demande à la voir. Sourcils froncés, visage figé, les secondes défilent trop vite pour que quelqu’un puisse bloquer la porte, et les traits de Bass Wolfhart se dessinent devant elle tandis qu’il rentre dans son bureau. L’gamin venu l’informer s’en va, disparaît dans un nuage de confusion alors que Letha se lève, la colère qui arme son regard. « What makes you think you can get in here and call up a meeting for no reason ? » Les billets verts glissaient facilement entre ses mains. Bass, l’héritier du jour qui avait arrêté de compter les Black Dimes qui dépassait de ses poches. Un gamin de plus qui n’avait jamais eu à se soucier de quoi que ce soit d’autre, si ce n’est lui-même. L’jour lui aussi, avait choisi son camp. En pleine lumière, les deux covens savaient que les apparences devaient être parfaitement maîtrisées s’ils voulaient s’en sortir à New-York. « Get the hell out of here before I ask someone to drag you out. » Elle s’approche, l’océan s’déchaîne dans ses pupilles. « And I don’t think you’re gonna be able to do much against one of ours, I wouldn’t want you to ruin your new manicure. »

La colère dans ses tripes, Letha elle regarde Bass et son air de gamin cynique, l’héritier qui s’enfonce dans les abysses du Queens pour réclamer son dû. Elle étouffe dans une pièce qui l’enferme entre ses murs, elle crève à l’idée d’imaginer le regard qu’aurait son père, s’il la voyait là. A se cacher derrière un bureau pour oublier les dettes grandissantes qu’elle n’arrivera jamais à payer. Il n’y avait que des illusions pour couvrir ses plus grands mensonges. Et face à lui, elle savait très bien que ses chimères ne tiendraient pas bien longtemps. Des promesses déjà disséminées dans le vent, alors que l’océan déferle sa colère sur les murs du port. « Don't worry. My manucure's gonna be just fine. » Bass plonge son regard dans le sien, et y’a rien à l’intérieur de ses pupilles. L’visage éteint alors que celui de Letha, brûlait à la vue de tous. « Now, do I look like someone who would waste my one time ? » Elle croise les bras, traits qui tentent de disparaître pour effacer toute trace d’inquiétude. Sa plus grande faiblesse, c’est qu’elle voulait pas disparaître. « You know damn well why I'm here, Miss Black. Don't make me insult you by saying it. »

Un long soupir. Elle connaissait les gars comme lui, ceux qui dominaient le monde en haut d’une tour d’ivoire, ceux qui ne voyaient rien si ce n’est les billets qui glissaient entre leurs mains. Il n’y avait rien de plus vide que son regard. Au fond, lui, il avait New-York à ses pieds, et c’était suffisant. Ça lui faisait pitié, de savoir qu’il ne serait jamais rien de plus que ça. Ou peut-être que c’était le reflet de ses propres tourments. La crainte de ne jamais être rien de plus que ce qu’elle était aujourd’hui. L’idée terrifiante d’être enfermée à tout jamais entre les murs de la ville, sans pouvoir jamais s’en échapper. « Cause you’re not here to insult me, I presume. » Un rire narquois s’échappe de ses lèvres tandis qu’elle s’avance d’un pas feutré vers lui. « You can ‘Miss Black’ me all you want. You’re not getting any money from me. » Le vent qui souffle sur les vagues de l’océan, l’air qui s’mélange jamais à l’eau. Letha et Bass, ils n’avaient rien en commun, si ce n’est leur volonté de faire plier l’autre. « You don’t want to insult me ? Fine. Go fuck yourself, and go back where you belong. »

Letha regarde son empire s’écrouler sous ses yeux, trésor de poussière réduit à néant dans un feu d’artifice grandiose. Les voiles noires qui veillaient sur le port, souvenirs tumultueux de toutes les fois où les embarcations se sont écrasées à l’horizon. A New-York les black dimes écrasaient l’espoir jusqu’à le réduire en centre. Et Bass, avec ses grands yeux bruns engorgés par la haine, il avait le pouvoir de vie ou de mort sur l’héritage de son paternel. Les dettes d’un passé qu’elle peinait à contrôler, le cœur à la dérive, caché dans les profondeurs de l’Atlantique. Le sorcier d’la day court avait les pleins pouvoirs, banquier avare du trésor des autres. Elle aurait voulu que les erreurs soient emportées avec l’écume, mais ça ne se passait jamais comme ça, pas dans ce monde-là. Elles restent, elles s’accrochent, et personne ne parvient à les oublier. Encore et encore on les répète, comme une mélodie tenace qui refuserait de s’échapper de son esprit.

Il est prêt à partir, porte ouverte vers l’inconnu, les Black Sails dans le creux de sa main. « Wait. » Quelques enjambées pour se retrouver face à lui, son dos qui referme la porte pour sauver la seule chose qui lui reste vraiment. Elle a toujours pensé que ça deviendrait facile, de perdre, avec le temps, peut-être. Mais ça n’est jamais vraiment arrivé, pas pour elle. « What do you want ? » Letha connaissait les gars comme Bass. Ceux qui pensaient que le monde leur appartenait, un terrain de jeu sur lequel ils renversaient tous les pions. Et ils voulaient toujours quelque chose. Un prix pour se récompenser d’marcher sur l’univers, d’écraser les étoiles. Y’avait des impacts de métérores partout où ils passaient, comme pour se rappeler qu’rien ne pouvait les arrêter. Et elle avait passé sa vie à arborer son visage d’un sourire pour oublier qu’elle ne pourrait jamais gagner face à eux. Parce que l’univers refuserait à chaque fois de la voir renverser les règles du jeu. « You wouldn’t have came here if you didn’t want something else than money. » Condamnés à reprendre les mêmes pions, Bass et Letha n’avaient plus qu’à mettre cartes sur table. « So what is it ? Name your price, Wolfhart. But since you mentionne dit, I bet it’s related to potion traficking, isn’t it ? »