affamée d'amour, avides de remords (poppy)

Bishop tradition qui semble vieille comme le monde, Bishop après Bishop, Coeur après Coeur, femme après femme. Elles sont toujours seules les Bishop, jamais d’homme, non, jamais. Pas un descendant masculin dans leur lignée, pas un homme pour venir s’interposer. Imitation dérisoire des Amazones, utilisation du sexe opposé pour concevoir, avant de les oublier. Les mâles sont mauvais Poppy, ne l’oublie jamais. Et ça reste gravé dans sa mémoire, de ces mots que sa grand-mère lui murmurait. Bishop fragiles, Bishop usées, les nerfs à fleur de peau et le moral cassé. Elles sont comme du cristal les Bishop, aussi précieuses, pour leur cœur aimant, gouffre dans lequel se perdre, sacrifice admirable qu’elles acceptent de faire depuis la nuit des temps. Bien précieux elles sont convoitées, pour leur étrange habilité, celle de réparer les sentiments les plus abimés.
Mère & Grand-mère Marigold Bishop n’a eu qu’une fille : Violet, qui elle-même n’a eu qu’une fille : Poppy. Branche qui s’éteint lentement, Violet n’a pas supporté, un an seulement pour assurer le rôle de mère, avant de finir par se pendre dans sa chambre. Trop fragile, épuisée par son pouvoir, épuisée par ce monde qui n’a jamais vraiment voulu la voir. Poppy n’en garde aucun souvenir, juste des photos usées gardées dans un tiroir fermé à clé. C’est Marigold qui l’a élevée, femme forte, tout le contraire de sa fille, les mains usées par le temps, la peau aussi dure que de l’acier. Amie terrible de Mao Nabashima, c’est au sein de leur clan qu’elle a décidé d’élever Poppy, de lui donner un avenir où elle ne serait pas passive, où elle pourrait apprendre à exister. si seulement elle avait imaginé…
Curiosité gamine intenable, ouragan de questions, avide d’aventures. Les genoux écorchés, toujours rire plutôt que pleurer, sale gosse au tempérament de feu bien trop souvent réprimandée. Poppy Bishop, calme toi, tiens-toi droite, arrête ça. Grand-mère trop stricte, à lui faire avaler les préceptes sorciers, les enjeux sur ses épaules, des heures enfermées dans leur résidence, regard sévère de Marigold, le claquement de la règle sur le bout de ses doigts, à chaque erreur. Quand est-ce que tu apprendras gamine ? Si tu n’écoutes pas tu finiras comme ta mère, une écharpe autour du coup, suspendue à une poutre au plafond. Mais les menaces glissent sur sa peau, Poppy préfère l’aventure au calme, curieuse, elle se retrouve toujours là où il ne faut pas, finit punie, le rire coincé sur le bout de ses lèvres.
première larme c’est à neuf ans environ que ça la frappe, en plein de la poitrine, comme une lame entre les côtes. C’est à neuf ans que ça arrive, alors qu’elle se fracasse contre Fusa. Peau contre peau, c’est terriblement personnel, intime, le cœur qui pleure, la solitude terrible. Elle comprend pas Poppy. Non. Elle comprend pas pourquoi y a les larmes qui se mettent à couler. Alors elle attrape Fusa, serre fort, comme elle peut, marmonne des mots sans queue ni tête pour lui promettre que ça va aller. Premières larmes, premières armes, alors qu’elle dévore la tristesse de la Nabashima.
dernière larme sentiment d’agonie, la panique qui la réveille au milieu de la nuit, douleur, douleur, douleur, alors qu’elle hurle. Gamine, dix ans d’existence et les ténèbres qui s’enfoncent soudain. Tiens moi la main Poppy murmure sa grand-mère alors qu’on son cœur défaille. C’est la vieillesse qui a raison de l’ainée des Bishop, au beau milieu de la nuit, par surprise. Fidèle Poppy, elle fait comme on lui a apprit, le corps de Marigold serré entre ses bras faibles, elle aspire comme elle peut ce trop-plein de peur, permettre à la personne qu’elle aime plus que tout de partir en toute tranquillité, sourire résigné sur les lèvres. Sacrifice émotionnel, Poppy met plus d’un mois pour s’en remettre, le cœur gelé, frigorifiée d’avoir été caressée par la Faucheuse.
Entrainement Sans relâche, froid, impersonnel, Marigold disparue il faut que Poppy maitrise son don le plus rapidement pour combler le vide laissé. Entre carotte et bâton, il ne faut pas longtemps pour qu’elle rentre dans le rang, petite princesse gâtée par les Nabashima, il y a les peluches offertes pour calmer les pleurs, pour calmer les bleus, pour calmer les peurs. Chaque heure passée à supporter émotion après émotion est récompensée par un gâteau, un collier, une robe. Chaque cicatrice qui fleurit sur sa peau est cachée par une étoffe, kimono soyeux, rouge et or, pour faire briller son regard. Oiseau en cage, elle reste enfermée à l’intérieur de l’hotel particulier, ne sort que très rarement, la flamme de la curiosité qui s’éteint avec l’âge, remplacé par la paresse et la docilité, moins de genoux écorchés, plus d’heures à se prélasser.
Ren C’était stupide. Terriblement stupide. Le genre de choc qu’on maitrise pas. Premières brûlures à 14 ans, alors que leurs mains se frôlent lors d’un repas. Méfie toi Poppy, souviens toi. Pourtant ils ont cet âge ou la frontière est floue, entre amitié et désir, ça crame dans leurs regards, quand leurs bouchent ne font que mentir. C’est impensable, Ren Nabashima et Poppy Bishop. Pas le même rang, pas le même but, pas le même futur. C’est méprisable, risible, à vomir. Bousculades dans les couloirs quand il la regarde, les lèvres qui se tordent de dégout alors qu’il serre un peu trop fort son poignet, peau contre peau les émotions qui circulent en secret. Relation fragile, en équilibre, secrète. Ren est un feu qui brûle tout, l’égo immense et l’ambition dévorante, Poppy se crame les doigts à essayer de l’aimer. Méfie toi Poppy, c’est pas pour toi. mais elle n’arrive pas à arrêter.
Fusa Fusa c’est étrange, comme si y avait un fil rouge relié entre leurs deux cœurs. Amitié fusionnelle, l’impression qu’elle pourrait crever pour elle, les secrets qu’elles partagent à deux, en un sourire c’est des paragraphes qu’elles s’échangent. Fusa elle l’a dans la peau, comme une ombre elle voudrait la suivre, ronronnement de plaisir quand la Nabashima la félicite. Fusa qui lui donne l’impression de marcher droit, phare dans la nuit, c’est elle qu’elle repère entre tous, lueur brillante d’émotions contradictoires, et Poppy qui apprend à aimer chaque tonalité qui danse dans le cœur dérangé de Fusa.
Sang sur les doigts elle a 17 ans quand elle se retrouve avec du sang autre que le sien sur les doigts pour la première fois. Embarqué dans un tourbillon, elle a suivit Van et Fusa sans trop vraiment comprendre pourquoi. Pour protéger Nana ou une connerie du genre, ce qui est certain c’est qu’ils l’ont tué, lui, le meilleur ami de Ren. Ce qui est certain aussi c’est que ça l’a brisé, un peu plus, la violence de l’action, les émotions douloureuses, la sensation de crever encore et encore imprimée dans son crâne. Et quand elle a du inventer une excuse auprès de Ren, elle s’est sentie terriblement sale. Pardon c’est la dernière fois, promis. Plus jamais elle lui mentira, mais juste cette fois, pour protéger Van et Fusa.
Ren(2) Ca la réveille comme un sursaut, la sensation que les choses ne sont plus comme elles devraient être. Douleur terrible dans le ventre, dans le cœur, ça lui arrache un hurlement. T’es trop sensible Poppy, à fleur de peau, nerfs exposés alors qu’elle agonise. Elle sent que quelque chose se casse chez Fusa. Elle sent que quelque chose se casse chez Ren. Elle sent tout ça et rien à la fois, malgré l’Osiris qu’elle avale pour essayer de calmer la douleur. Ca ne marchera pas. Et l’impression de dériver, folie suicidaire qui crame dans ses veines alors que le clan entier semble soudain en ébullition. Personne ne l’a vu venir, personne n’arrive à l’arrêter, et quand elle arrive pieds nu jusqu’à la scène, c’est pour voir le rideau final tomber : Ren qui s’effondre, mort de ses propres main, besoin égoïste de briller jusque dans sa tombe. Tu m’avais promis, alors que Poppy divague, panique, agonie. Et après tout ça, tu finis comme ça ? L’envie de le rejoindre, l’impression qu’elle a besoin de faire pareil, c’est Shoto qui l’attrape pour l’empêcher de crever à son tour. La folie est contagieuse, et même éteint elle sent encore Ren s’éparpiller. Elle n’assiste pas aux funérailles, alitée, elle essaye de revenir sur le chemin de la réalité. Il ne reste plus que Fusa maintenant, et elle s’accroche comme elle peut à la main de la survivante, voudrait lui faire promettre qu’elle ne la laissera jamais tomber.
Six Feet Under parait qu’elle a l’âge maintenant, pour remplacer sa mère, sa grand-mère. Parait qu’il faut qu’elle paye sa dette maintenant, qu’elle serve à quelque chose, au lieu de continuer de faire joli dans le décors en soirée. Salle privée à l’arrière du Six Feet Under c’est là où on l’a installé, princesse cachée des lieux, il faut payer le prix fort pour pouvoir venir la voir, pour pouvoir avoir le droit, de venir s’oublier dans ses bras. Pas une catin, elle n’écarte pas les cuisses, loin de là, on lui a promis que c’était pas son rôle de jouer à ça. Dévoreuse de douleur, receveuse de coups, donneuse d’amour, elle jongle avec les émotions de ses clients avec dextérité. Habituée, névrosée, y a plus vraiment grand-chose pour la faire déraper. Elle garde bien au chaud les secrets de ses clients, leurs peurs les plus profondes, leurs douleurs les plus vives, leurs désirs les plus ardant. Joli coffre ouvragé où elle range le tout, il n’y a que les Nabashima qui auront le droit de savoir ce qu’il y a dedans.
léthargie elle se prélasse Poppy, vingt-six ans qu’elle reste à la surface, tête hors de l’eau, et ça lui suffit comme ça. Princesse de feu qui se languit dans sa tour, elle n’attend pas qu’on vienne la délivrer, hors de question, elle aime sa cage dorée. Parfois elle s’autorise à jouer, un peu, les intriguantes, quand l’ennui se fait trop grand, danser en équilibre le temps d’un instant sur le rebord de la fenêtre. Elle ne compte plus les marques gravées sur sa peau Poppy, elle ne compte pas non plus les masques qui s’empilent, les rejets qui s’accumulent. Douleur sourde d’une vie sans intérêt, elle savoure les instants de plaisir volés : une sucrerie, un collier, une étoffe, un parfum, un souvenir dérobé, la sensation d’exister.