make me immortal with a kiss (Ava)

21 Septembre La plus belle date. La plus belle journée. Les feuilles ont pris une teinte cuivrée, le vent est encore doux, la nature change, la plus belle saison. Les cris de Frida Stark résonnent dans la demeure des Stark. Alaric Stark a le visage fermé, les bras croisés sur sa poitrine et fait les cent pas devant l’immense porte. Il est nerveux. Premier enfant. Il veut un garçon, il ne désire que cela que sa femme lui offre ce cadeau de la vie, un soldat pour le coven, pour New-York. Les hurlements de douleur cessent, Frida vient de donner naissance, elle vient d’offrir la vie à un petit être. La porte s’ouvre quelques minutes plus tard, l’infirmière a dans les bras un poupon, un bébé magnifique qui réjouit le père. Il tend les bras, un sourire aux lèvres, l’enfant a son regard froid, glacial. « - Félicitations Monsieur, vous avez une belle petite fille » Le sourire se fane, meurt, il fixe la sage-femme comme si tout était de sa faute. Elle balbutie alors. « - Comment voulez-vous l’appeler ? » Il ne changera pas, cela devait être un garçon, il devait s’appeler Avery. Alors elle sera Avery. « - Avery » Dit-il froidement avant de rendre l’enfant à l’infirmière. Alors sur ses mots, il tourne les talons sans même un regard pour celle qui vient de lui offrir un enfant, sans même une once d’amour pour cette fille qu’il ne désirait pas.

NovembreLa petite fille se regarde dans le miroir. Elle touche ses cheveux blonds coupés courts. Elle sait qu’elle n’est pas un garçon pourtant son père s’évertue à ne pas les laisser pousser ses belles boucles dorées. Elle n’a pas le droit d’être une petite fille comme les autres. Elle porte du noir en permanence et n’a pas de jouet de fille. Aujourd’hui est un grand jour et elle sait qu’on va la prendre pour un garçon. Pour la cérémonie de la prise du gouvernement pas le coven automne elle ne portera pas de robe. Un costume pour petit garçon. La voix sévère de son père s’élève dans le hall. « - Avery, cesse de flâner ! » Le rappel à l’ordre est dur, radical. L’autorité ne lui fait pas peur, elle n’a connu que cela. Elle file pour être à sa hauteur, sa mère se tient à ses côtés, son ventre arrondi par la grossesse. Ava regarde ce ventre, elle sait ce qui se trouve à l’intérieur. Elle sait que s’il s’agit d’un petit garçon alors son père ne la regardera plus. Elle sait aussi que s’il s’agit d’une petite fille, elle subira les mêmes foudres qu’elle. Dans les deux cas, elle n’aime pas l’idée que sa mère puisse donner naissance à un nouvel enfant.

Février C’est au tour de la petite fille aux boucles d’or d’entendre les cris de sa mère. Son père n’est pas encore rentré, une réunion, un conseil. Il travaille dans la politique, il est souvent absent, finalement ce n’est pas plus mal. Ava attend sagement, nerveusement que sa mère mette au monde un nouvel enfant. Elle ne sait pas si elle doit être contente, si elle doit être triste. Pour une petite fille de quatre et demi, elle est mature, elle comprend les choses, bien plus vite qu’un enfant lambda. Les adultes ne s’en rendent pas encore compte. Ava tortille ses cheveux court entre ses doigts, elle a son pouce dans la bouche, elle fie la grande porte de la chambre. Sa mère tient à accoucher à l’ancienne, naturellement, pour être au plus proche de ses enfants. Drôle de façon de penser quand on voit la distance qu’elle met avec sa propre fille pour ne pas décevoir son époux.  Puis les cris cessent, sont rapidement remplacés par ceux d’un nouveau-né. Il est tard dans la nuit, Ava se redresse, comme réveillée d’un bond. La porte s’ouvre et l’infirmière bien plus tendre que ses parents lui fait un petit sourire. « - Tu veux voir ton petit frère ? » La petite fille hoche la tête, hésitante. Elle s’avance et entre dans la chambre parentale. Sa mère est à demi-allongée dans l’immense lit, elle tient un petit qui gazouille légèrement. Le cœur d’Ava se brise quand elle voit le regard plein d’amour de sa mère pour son fils. Cependant, elle s’avance curieuse, monte sur le lit, sa mère lui sourit légèrement. Cette mère n’a jamais su l’aimer, elle a trop peur de décevoir son époux en protégeant sa petite. Alors elle s’éloigne d’elle jours après jours. Il y a un geste tendre cependant, Ava s’en souvient encore, cette caresse dans ses cheveux tendrement, maladroitement. Ava regarde son frère qui s’endort déjà… Elle n’a pas le temps de profiter du moment que des pas résonnent dans le couloir, sur le sol en marbre. Ava n’a pas le temps de répondre que son père entre dans la pièce. Elle s’écarte de son petit frère et de sa mère. Son père ne regarde pas sa fille, il regarde sa femme et son fils. Ava le revoit parfaitement esquisser un petit sourire. « - Un garçon ? » La mère hoche légèrement la tête. Il lui arrache presque le petite des bras. Il hausse enfin les yeux vers sa fille de quatre ans. « - Avery, au lit, demain tu as des leçons à revoir et il se pourrait que je t’interroge » Ava baisse les yeux, elle ne répond pas. Le père retourne à la contemplation de son fils, la petite fille devient invisible à nouveau. Elle regagne alors son lit, sans réellement réussir à trouver le sommeil.  


Juillet Il fait chaud. Un été presque caniculaire. La jeune fille sent la sueur perler sur son front. Elle a un bandeau qui retient ses cheveux courts en arrière. Sa tenue moulante et noire et imbiber de sueur. « - Encore ! » La voix dure de son père résonne dans la salle d’entraînement. Il attaque, elle tente de parer. Elle échoue, encore. Elle a envie de lui hurler qu’elle n’est qu’une petite fille de douze ans et qu’aucune gamine de cet âge ne pourrait battre un adulte formé. Pourtant, elle se tait, elle continue. Elle ne s’arrête pas. Elle persiste. Elle veut lui montrer le meilleur d’elle, elle aimerait qu’il voit qu’elle est douée, elle aussi. Que ce n’est pas pas qu’elle est une fille qu’elle va le décevoir. Il frappe, elle tente d’esquiver. Elle n’est pas encore assez rapide. La douleur n’est rien en comparaison à la colère et la frustration qui montent en elle. « - Encore ! » Elle n’en peut plus. La chaleur est en train d’avoir raison de ses nerfs, d’avoir raison d’elle toute entière. Il veut la pousser à bout, lui apprendre, qu’elle soit la meilleure, mais elle ne voit son père que comme un tyran, un bourreau. Elle le déteste à ce moment précis, elle ne comprend pas. Elle ne l’a jamais compris. Cet homme si dur avec elle… pourquoi ? Tout ressort, alors qu’il s’apprête à attaquer, elle contre, ses mains deviennent incandescentes et le bâton en bois que son père tient se brise en charbon. Elle reste stupéfaite, tellement qu’elle ne voit pas le léger sourire de son père. Il y a de la fierté dans son regard, mais elle loupe cet instant, elle ne saura jamais.

Septembre Elle est relativement fière ce jour-là. Elle entre à l’université, c’est une façon un peu à elle de s'émanciper. Elle s’éloigne de son bourreau de père. Elle s’éloigne de sa famille. La seule chose qui l’attriste c’est de s’éloigner de son frère. Lui n’a jamais fait de différence, il a toujours aimé sa sœur, et elle, et bien elle a fini par l’aimer son frère, sans être jalouse. Il est encore jeune, douze ans, il a encore du temps devant lui, mais elle sait déjà qu’il va lui manquer. Elle a une chambre d’étudiant, elle ne pouvait plus vivre dans la demeure familiale, elle ne supportait plus l’ambiance. Elle voit cela comme un gage de liberté et pourtant, elle s’apprête à prendre la voie toute tracée que son père lui a donné. Ce qu’elle ne désire pas. Elle ne veut pas. Pour le moment, elle ne veut pas décevoir son coven, elle prend modèle sur son cousin Roman, homme exemplaire. Elle ne veut pas causer de problème, ne veut pas être une étincelle. Tant qu’elle s’éloigne de son père, cela lui convient. C’est aussi un moyen de montrer ce qu’elle vaut cette université. C’est un montrer de montrer sa force. Elle se souviendra toujours de cette phrase de son père, juste avant qu’elle ne parte. « - Un seul charbon ardent met en feu tous les autres. » Ce jour-là, Ava a souri à son père, parce qu’elle savait à quoi il faisait allusions.

Juin Ce jour-là, elle a failli tout lâcher. La remise des diplômes. A l’université, Avery a fait pousser ses cheveux, elle est devenue une vraie femme, contrairement à ce que son père semblait pouvoir pour elle. Elle passe ses mains sans ses boucles dorées, elle se regarde dans le miroir. Elle n’est pas prête. Elle n’a pas envie, elle est partagée, indécise. Elle est paniquée. Ava pense qu’elle fait une bêtise, qu’être officier de police n’est pas pour elle, qu’elle ne fait que suivre le désir de son père. Elle a peur de se tromper, de ne pas faire cela pour elle mais pour lui. Elle est à deux doigts de tout plaquer, de s’enfermer dans une librairie, de quitter ce coven qu’elle affectionne tant. Elle ne se sent pas à la hauteur. Elle a l’impression de ne pas être à sa place. Crise existentielle ou réel mal-être? La nausée s’installe dans son ventre, elle a envie de vomir. Pourtant… Pourtant elle a aimé ses études, cette formation. Ordre c’est fait pour elle, ce sont ses repères pour ne pas tout consumer dans les flammes. Elle a besoin de ce cadre de vie pour être bien. Pourquoi tant d’hésitation ? Parce qu’elle se rend compte qu’elle est comme son père, qu’elle aime l’autorité, qu’elle en a besoin pour vivre, qu’elle a fini par aimer cela. Ava court dans les toilettes, elle rend son petit-déjeuner. L’idée d’être comme son père la désespère… Et pourtant, elle se rince la bouche, elle se relève, elle est forte, bien plus forte que ce qu’elle image. Elle ne le fait pas pour lui, elle devient qui elle a envie d’être. Ce jour-là, elle ira récupérer son diplôme avec un sourire fier.

Décembre Elle n’a que 22 ans. Jeune officier de police, elle ne maîtrise pas les révolutions humaines. Les révoltes la mettent hors d’elle. Elle aimerait comprendre comment on a pu en arriver-là ? Pourquoi ? Elle ne porte pas particulièrement les humains dans son coeur, elle sait ce qu’ils ont fait subir à ses ancêtres. Cependant, elle n’est pas pour les restrictions. C’est simple, à ses yeux, ce sont ce genre d’actes qui causent des guerres. Ils nous ont fait pareil, mais pourquoi ne pas agir avec plus de maturité et montrer qu’on est supérieur dans notre raisonnement ? La vengeance. La colère. Tout cela n’engendre rien de bon. Lors de ces révoltes elle perdra un être cher. Un oncle, un modèle, un suprême. Abel perdra la vie. Elle ne comprendra pas tout de suite ce que cela veut dire. Le trou béant qu’il laissera. Son parrain a disparu. Qui va relever l’automne ? Elle entend encore les douces paroles de Roman, un bel hommage lui est consacré. Elle ne pleurera pas, elle n’a pas le droit, elle ne peut pas. En uniforme, elle fera une haie d’honneur pour son sang, sa famille, sa patrie. Elle ne tombera pas dans la haine, elle est plus forte, elle se contrôle. Son père lui a appris que les sentiments incontrôlés n’engendrent rien de bon. Elle se veut être la voix de l’apaisement, de la sagesse. Elle sera un pilier.

Février A nouveau, l’étincelle et tout s’embrase. Rébellion. L’humanité se révolte et on en paye le prix. Avery suit son cousin dans ses décisions. Elle est au front, soldat, flic. Elle n’a pas peur, elle est formée. Pourtant elle n’est pas prête à la guerre qui éclate. Elle n’est pas prête à ce qui se passe. Encore aujourd’hui, elle revoit les corps calcinés, les morts dans les deux camps. Elle a envie d’hurler que la violence n’est pas la solution mais il n’y a plus personne pour l’entendre, pour l’écouter. Son visage noircit par les cendres qui s’envolent, elle se retourne et assiste à une triste scène. Elle voit Roman prendre Amelia dans ses bras. Le corps de la femme de son cousin est sans vie. Elle perd à nouveau un membre de sa famille. Amelia était une amie. Ce qui l’attriste le plus c’est la perte de Roman. Comment peut-on perdre son âme-sœur et se relever ? Elle sait ce qui suivra, les humains devront se plier aux règles intransigeantes. La situation ne sera pas réglée pour autant. Ce n’est que le début. Cette nuit-là, épuisée, elle ne rentre pas satisfaite de cette victoire. Comment peut-on l’être quand il y a des victimes ? Quand l’entente n’est qu’en demi-teinte, que la violence reviendra et qu’elle sera plus forte encore. Elle n’a pas d’affection particulière pour les humains mais elle comprend, n’est-ce pas ce que les sorciers ont fait voilà deux cent ans ? Pourquoi les deux peuples ne peuvent-ils pas vivre en paix ?

Janvier Suite aux affrontements, à son comportement, à son excellence, Avery monte en grade. Elle ne le doit qu’à elle-même. Deux nominations la même année. Elle a gagné la confiance de son cousin, son frère. Ils sont très proches, Ava est là pour apaiser des flammes de Roman, elle est là pour le pousser dans ses retranchements, le pousser à la réflexion. Elle lui voue la plus grande des fidélités. Elle sera toujours là pour lui. La confiance règne en maître entre eux et ils ne se cachent rien. C’est lui qui l’a nommé chef des sept, parce qu’il voulait être sûre de la personne, sûr de pouvoir compter sur elle, et il pourra se reposer sur sa cousine.

Octobre Nomination. Elle prend un grade dans la police. N’étant plus juste un officier, elle devient lieutenant. Encore une fois, cette promotion, elle ne la doit qu’à elle-même. Elle ne veut pas porter le fardeau de son père, elle ne veut pas être comme lui. Pourtant, elle le rend fière. Elle se bat pour être d’une excellence remarquable. Elle est fière d’avoir une nouvelle plaque, de pouvoir briller au sein de son coven. Elle est fière d’elle pour ce qu’elle a accompli. Seule. Indépendante. Elle n’avouera sans doute jamais qu’elle en est là aujourd’hui parce que dès son plus jeune âge, son père l’a poussé dans ses retranchements.

DécembreLe pouvoir glisse. Elle ne l’a jamais aimé. Il corrompt, rend fou. Elle n’a jamais été attiré par lui. Elle ne comprend pas ses gens prêts à se battre pour l’obtenir. Ce qu’elle aime c’est la justice, l’équité. Elle en a besoin. La Nuit prend la place, gouverne. Elle reprend ses esprits après les rébellions qui ont secoué le règne de l’automne, qui ont pris des vies. Il y a d’autres choses à régler. Les Red Thieves et leurs mystères. C’est sa mission première. Elle gère une équipe chargée d’enquêter sur eux. Elle ne sait pas quoi en penser, une frénésie qui semble s’emparer de la ville. Le Ciel semble vouloir rétablir une certaine équité… mais combien de temps cela va-t-il durer ?