a stranger beneath my face (zélie)

a stranger beneath my face

zélie & abel ✗ alright

Burn a hole in my eyes, you know me, I worry, could always use some pity, scared to do a session, if it's in the city. You and I are monsters.

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Des étoiles dans les yeux d’une foule qui s’étouffe dans ses propres illusions, la musique qui retentit dans les oreilles comme le couperet d’une sentence à laquelle ils ne s’étaient pas préparés. L’été et ses grandes réceptions interminables, l’été et ses promesses qui font fi de la réalité, les visages figés dans une sorte de joie perpétuelle, un tissu de mensonges qu’il a choisi d’ignorer. C’était plus facile, de se couvrir d’or dans des résidences aux allures de château ; et avec ses poings violacés, Abel fait tâche dans le décor, un pantin inanimé qui se perd dans les effluves d’alcool, les billets bien à l’abris dans la poche de son blouson. En dehors de Staten Island, les rues semblent toujours plus bondées, couvertes de sourires qu’il n’a pas l’habitude de croiser au détour d’une île accablée par la misère d’une existence qui leur a été imposée.

Le gamin a craché sa colère dans l’oubli, a remplacé sa rage par la cupidité, le temps au bout de ses doigts, le confort d’une pierre qui lui offre la sécurité de tout contrôler. Tombé dans l’éphémère, les corps se tordent et se rassemblent, devant ses yeux, la scène se transforme en tableau, alors qu’il s’apprête à repartir dans un quotidien plus fade. Ses pas le guident vers la sortie, quand il croise le regard de Zélie. La fille des propriétaires des lieux. Sa réalité à elle, était trop différente pour qu’ils puissent appartenir au même monde, et pourtant, c’était la même ville qui les abritait. Le néant dans son regard à lui, des étincelles dans le sien, il aurait pu inventer des milliers de mensonges et s’offrir le plus beau des sourires, un masque facile à porter. Sauf qu’il avait choisi d’abandonner, de se cacher derrière ses propres secrets, ceux qui l’engloutissaient dans les abîmes. Zélie accroche son regard, il pourra pas s’en aller sans un mot, et ils les laissent s’échapper entre ses lèvres gercées par le froid. « Qu’est-ce que tu veux ? »

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Zélie, la douceur de l’été cachée par un masque impeccable, éternelles illusions qui se dissimulent au détour des sourires et des lumières trop vives pour Abel, le bruit de la musique qui s’étend autour de lui. Le temps s’engouffre dans ses poumons, et en pleine nuit, les fêlures sont plus faciles à cacher, à oublier. Un fantôme de plus dans la foule qui s’élance d’un pas gracieux, les yeux des filles couverts d’un maquillage trop chargé, peut-être pour confronter leurs rêves aux allures d’illusions. « Une entrevue … en privé. ». Sa main se pose sur son bras, Abel à des promesses à tenir et des mensonges à dessiner, au creux de sa douloureuse réalité. « Pour parler affaires. » . Un haussement d’épaule avant de la suivre. Les noms et les corps s’enchaînaient et avec le temps il était devenu difficile pour lui de les distinguer les uns des autres.

Tous semblables dans un océan mêlé d’alcool et de sueur. Des filles dont il refusait de connaître le prénom parce que ça lui rappelait qu’elles n’étaient pas que des mirages créés par son esprit. Avec le poids de cent mille hommes sur ses épaules, ils descendent les marches et se retrouvent dans la cour intérieure. Il est devenu celui qui n’était qu’une main armée, un pantin qui ne pouvait se satisfaire que de l’oubli. Dans une éternelle ritournelle, il repartait jusqu’à tomber dans la même routine. Visage fermé, il savait que les riches n’avaient jamais les mêmes ambitions, les mêmes désirs. Emprisonnés dans leurs propres châteaux de sel, ils s’étaient tous convaincus d’être différents du reste du monde. Doux mensonge qui ne leur offrirait pas l’absolution.

Zélie a le regard éteint et Abel commence à se demander pourquoi est-ce qu’il est véritablement ici. « Alors, tu veux parler affaires ? » Il prend une clope, la fumée s’échappe d’entre ses lèvres. « J’veux pas dire, mais c’est une putain de baraque. Tu veux toujours parler à faire ou on s’trouve une chambre ? » Pas de classe dans ses paroles. La vérité, la seule, crue et laide, la réalité d’une ville qu’il a appris à connaître avec le temps. Un sourire en coin, il cache déjà son jeu.

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Des secrets entreposés au gré de ses nuits blanches, c’était ce qui avait porté Abel jusque dans les endroits les plus douteux de New-York ; le regard vide et le cœur désespérément froid. Dans ses illusions il devenait celui qu’il avait pu être, celui qui n’aurait pas si peur de la lumière qu’il continuerait à chasser la nuit. Visage tourmenté de la gamine de l’été, c’était une erreur de penser que les autres âmes qui peuplent la ville ne se brisaient pas, parfois, elles aussi. La collision entre les deux mondes était inévitable, le chaos était orchestré depuis longtemps et les masques ne pourraient pas mentir éternellement. Sur l’écran noir, il visionnait ses plus belles erreurs, et peut-être que Zélie aussi, elle se tourmentait à coup de « pourquoi ».

Elle l’accuse, il s’offusque. Y’a jamais rien eu de plus que de l’argent sale, passant de main en main. « Ecoutes, je sais pas ce que tu t’imagines, mais j’ai rien fait de ce genre avec… Putain pour qui tu me prends ? » Les yeux écarquillés, Abel murmure de manière trop pressante, incapable de comprendre comment elle a pu arriver à cette conclusion. Tant pis pour le coup d’un soir, alors. « Je fais pas ce genre de conneries. Vous êtes tous complètements barjots. » La fumée s’échappe d’entre ses lèvres, une cigarette de plus engloutie par ses poumons. « Mais j’vais voir ce que je peux faire pour tes courses ». Quand il la regardait, Zélie, c’était comme affronter le reflet de quelque chose qu’il n’était pas prêt à découvrir. Son cœur se tordait dans sa poitrine en imaginant le genre de mensonges qu’elle devait se raconter à elle-même, elle aussi, pour essayer d’oublier les démons qui s’affrontaient à l’intérieur de son crâne.

Des milliers d’occasions ratées dans un tourbillon de regrets. Abel connaissait bien la rengaine, l’histoire qui se répétait, encore et encore, même si les protagonistes continuaient à changer. Il regarde derrière elle, un point fixe invisible caché entre le rien et le tout. « C’est dangereux, c’que tu demandes. A quel jeu tu joues ? » Des questions sans réponses qui disparaîtraient sans aussi aisément que la brume du matin. Le soleil emportant tout sur son passage.

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Le monde s’étouffe avec les cris de ceux qui se sont perdus trop vite. Larynx fatigué de voir que les choses restent irrémédiablement les mêmes. Le visage d’Abel se fige, enfermé dans la glace, regard froid qui s’endort en pensant à tout ce qu’il ne pourra jamais être. Zélie, elle a le visage trop dur, les traits se confondent et les apparences qu’elle pensait maîtriser s’écroule. « Il faut croire que les choses sont plus complexes qu’elles ne semblent l’être. » Il aurait aimé être de ceux qui avaient quelque chose de beau à dire. Un truc grand, un océan de possibilités et des millions de combinaisons de mot qui demeurent enfermées au fond de sa gorge. « Tu t’es déjà senti pris au piège ? A te dire que même si tu pouvais revenir en arrière, rien ne serait de toute manière plus jamais comme avant ? » Il y avait quelque chose de tragique dans ses pupilles, une mélancolie de gamine qui ne pensait pas que les astres pouvaient la bouffer. Abel, lui, il pensait avoir tout vu. Les mystères n’étaient rien de plus qu’une répétition de ceux d’hier. Les souvenirs s’entremêlaient jusqu’à se confondre. Il avait épuisé toutes ses chances jusqu’à devenir prisonnier de ses propres regrets. C’était peut-être ça, leur malédiction. Disparaître dans les méandres d’une existence, enfermé par leurs propres démons. L’maître du temps se demandait parfois si c’était ce que le genre humain s’était infligé depuis la nuit des Temps. Si, avant que les continents ne dépérissent, ils s’étaient tous posés les mêmes questions. C’était ça, la plus cruelle des réalités : comprendre qu’ils n’ont jamais été si unique que ça. Ce qu’il était serait toujours ce que quelqu’un d’autre a été avant lui.

Dans ses tripes, ils se maudissait souvent de ne pas avoir trouvé une autre pierre. Une qui ne lui rappellerait pas qu’il pouvait changer le cours des choses, parce que ça n’a jamais été ce qu’il souhaitait. « Tout le temps. » Zélie, elle ne réalisait pas encore que c’était ce qu’elle serait forcée à faire jusqu’à la fin de ses jours. C’est pour ça qu’il n’a jamais pu haïr les sorciers. Parce qu’au fond, il savait qu’eux aussi ils se tourmentaient avec les mêmes cauchemars. Y’avait une part de lui qui voulait lui dire que les choses s’arrangeraient, qu’elle n’aurait pas toujours envie de retourner en arrière. Mais il ne savait pas très bien lui-même si c’était vrai. Si un jour il arrêterait de souhaiter de pouvoir tout recommencer. « Mais c’est impossible, de toutes façons. Revenir en arrière.
Personne contrôle le temps. » Et peut-être que Zélie, derrière sa démarche assurée, elle continuait d’espérer que quelque chose vienne la sauver d’elle-même. « Et qu’est-ce que tu voudrais fouiller, avec l’araignée ? » Avant qu’il ne soit trop tard.

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Sa confiance, il avait choisi de ne l’accorder à personne. Trahi par les fantômes qui hantaient son propre esprit, il avait abandonné les illusions pour se confronter à la réalité. Terrifié à l’idée de perdre à nouveau, il avait enfermé son cœur à double tour pour devenir un simple visage dont on oublie aisément le nom. Une ombre qui avait préféré disparaître derrière les murs et les pavés de New-York, comme un mirage. Il avait creusé sa propre tombe, Abel, abandonné dans son sépulcre, entouré de fantômes. Chimères coriaces qui lui rappelaient toujours que la solitude dont il rêvait tant ne serait jamais possible. La chute avait été rapide, emportant tout sur son passage. Une seconde qui s’écoule dans l’éternité. Il savait qu’il faisait partie de ceux à qui on refusait de faire confiance. Un gars de plus dans une foule de menteurs, un humain dans un monde gouverné par des sorciers avides de pouvoir, condamnés par leurs propres ambitions. Il avait appris avec le temps les dégâts que celles-ci pouvaient engendrer. Les cauchemars devenaient réels à la nuit tombée, une pluie de regrets emportant tous les souvenirs douloureux.

« Donc t’espionnes les gens, c’est ça ? » Quelques bouffées de cigarette crachées avant d’écraser le mégot sur le sol. Il avait choisi son poison ; la nicotine qui envahissait ses poumons à la vitesse de l’éclair. Il pensait que les filles comme Zélie, elles finissaient toujours par brûler un peu trop fort. Elles disparaissent dans un grand boom, explosion qui emporte leur désespoir au gré du vent, rayon de soleil devenu cendre, transformation cruelle digne d’une grande tragédie. « Pourquoi ? t’as pas des putains d’laquais qui pourraient faire ça pour toi ? Avec l’argent d’papa et maman, hein ? » Rancœur à peine déguisée, peut-être qu’Abel a essayé de soigner ses plaies par la colère, comme un animal blessé qui refuserait d’abandonner. Elle avait tout, c’était ce qu’il se disait. Elle avait tout et il n’avait rien. Le maître du temps enviait ceux qui avaient osé naître sous une meilleure étoile que la sienne. Peut-être parce que lui, sur Staten Island, il n’avait connu que la douleur. « Mais j’te trouverais ce que tu veux. » Il secoue la tête. Abel n’a jamais su étouffer sa jalousie très longtemps.

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Leurs deux mondes n’entreront jamais en collision. Zélie et Abel sont aux antipodes, à l’opposée, ils se retrouvent ennemis sur le champ de bataille et dans leur cœur la révolte a beau être semblable, elle ne sera jamais la même. New-York a fait d’eux des soldats, des visages froids et placides qui rêvent de lendemains différents mais à tout jamais condamnés par l’adversité. Dans la rédemption, ils trouveraient peut-être une solution, une échappatoire. Mais en attendant, ils continuaient à disparaître, emportés par les courants d’une réalité trop amère. Elle le regarde, avec son jugement, sa supériorité. Derrière ses traits dociles, y’avait probablement autre chose, des blessures qu’il ne pourrait jamais comprendre. Parce qu’Abel, il n’avait fait qu’apprendre à jouer avec les apparences. Il n’était pas né dans un éternel bal bruyant et coloré. Les promesses qu’il avait faites, elles n’appartenaient qu’au passé. Mais dans le Queens, y’avait une sorte d’éternité, une jeunesse qui refusait de voir le passé et qui se concentrait vers l’avenir. Il savait que le prix à payer était cher. Mais peu importe où ils se trouvaient, à New-York, il l’a toujours été. « Très bien. J’te retrouverais. Je te donnerais le prix à ce moment-là. » Les aurevoirs semblent imminents, alors qu’sa colère a fini se répercuter sur la brune. Elle sera toujours au-dessus, gamine qui a hérité de tous les avantages, couverte d’inconvénients. L’argent coulait entre ses mains sans qu’elle ne puisse savoir pourquoi, et peut-être que ses souvenirs finiraient aussi par se dissiper, se transformer avec le temps, pour ne retenir que ces quelques fois où au final, elle avait pu gagner. Abel savait qu’malheureusement, sa mémoire ne le trahirait jamais vraiment. Poids d’une malédiction qu’il avait du mal à porter. Il prend un verre posé sur le bord, il la regarde une dernière fois, comme quand on reconnait sa défaite face à l’ennemi, comme quand on comprend qu’on ne pourra jamais gagner, quand bien même on essaie. Il la regarde, Zélie et ses grands airs, et au fond, peut-être qu’il lui souhaite de gagner sa propre bataille. « Amuses toi bien. » Et il disparaît dans la nuit.