These lips are sealed (Echo)

The sensation that you’re screaming but you never make a sound or the feeling that you’re falling but you never hit the ground

Séléné c’est l’enfant qui naît. Celle qu’elle aurait dû être. L’espoir d’une mère de donner à la famille un héritier, une héritière. Séléné est encore la première née. Du moins c’est ce que pensent ses parents à l’époque. Avant de découvrir l’enfant bâtard inespéré qui les as finalement sauvés. Mais pour le moment, la naissance de Séléné est une victoire. Un événement attendu et désiré … du moins les premiers temps. Car l’enfant ne braille pas. Pas de mécontentement. Aucun hurlement ne s’échappe de sa bouche alors même que les larmes ruissellent le long des joues poupines. Pas de babillement non plus. Juste de grands sombres en amandes qui observent le monde qui l’entoure. Ça et le silence. Ils prennent un peu de temps à comprendre. Encore plus à accepter. L’enfant cadeau devient enfant fardeau. La naissance tant attendue une épreuve à traverser. La gamine déçoit et trahie toutes leurs attentes. Ils finissent par ne plus vraiment s’en soucier. Loin des yeux, loin du cœur. Pour elle ça n’a jamais été plus vrai. Elle grandit dans l’ombre, apprends à savourer cette ironie pour elle qui est née du Jour. Mieux vaut apprendre à être invisible que d’endurer railleries et moquerie.

Tout change quand il arrive. Brother from another mother. Le véritable aîné. Le véritable héritier. Un soulagement pour le père qui peut reporter ses espoirs sur lui. Une gifle pour la mère, renvoyée à ses propres échecs. Elle a donné naissance à un rejeton cassé dont la présence ne fait que souiller l’apparente perfection de la maison. Une découverte pour l’enfant. Lui c’est le premier à l’aimer, le premier à s’occuper d’elle, le premier à prendre le temps d’essayer de la comprendre. Le bâtard que sa mère insulte est son premier allié. Alors elle s’y accroche Séléné. De toute ses forces. De toute son âme. Ses petits bras s’enroulent autour du corps encore malingre de son frère, ses doigts s’enfoncent dans sa peau dorée laissant derrière eux des marques sombres. Privée de tant d’attention qu’elle ferait tout pour le garder. La brune le jalouse aussi, pourtant. Car il lui montre tout ce qu’elle n’a pas. Les attentions sont pour lui. Il représente un espoir qu’ils avaient perdu. Alors il reçoit, encore et encore et Séléné observe. Le cœur brisé et l’âme en sang

Séléné c’est la gamine qui pleure, c’est la gamine souffre. Celle qui ne comprends pas et qui espère que quelque chose changera. C’est l’enfant naïve qui pense qu’obéir marchera. Celle qui baisse la tête pour cacher sa honte, plaque un sourire sur ses lèvres pour dissimuler la douleur et qui espère. Heureusement l’idiote finit par être écrasée. Elle s’étouffe dans la cruauté, agonise sans laisser filtrer un son. S’éteins dans la plus parfaite indifférence. Elle disparaît sans laisser de trace, ne laissant derrière elle qu’une coquille abîmée, une poupée lui ressemblant en tout point mais aux yeux rageurs et au cœur avide.

Séléné s’effondre. L’innocence s’enfuit, remplacée par l’amertume. L’enfance se termine dans la colère. La douleur écrasant la douceur.

Grief loves the hollow; all it wants is to hear its own echo

Echo.Echo. Echo. Echo. Echo.

Le surnom cruel. Le sobriquet vicieux. Celle qu’elle devient. Le nom est comme gravé au fer jour. Même les siens l’utilisent, conscients de tourner le couteau dans la plaie. De lui rappeler tout ce qu’elle aurait dû être mais n’est pas. Puisqu’elle ne peut s’en débarrasser, elle ne peut que l’embrasser. Echo c’est celle qu’elle devient. La source de sa colère. La représentation de tous ses maux. Accepter d’être Echo c’est accepter la haine. Les parts les plus sombres d’elle-même qui susurrent de douces promesses de vengeance et de douleur au creux de son oreille. C’est s’enfoncer dans une spirale sans fond qui ne peut qu’apporter peine et destruction. La brune l’accepte. Echo est un rappel. De leur indifférence. De leurs moqueries. Echo est un symbole. De la haine que l’on donne et de celle qu’elle rapporte. Echo a cessé de pleurer, de se morfondre, de quémander. Echo présente un visage lisse comme du verre, surface impénétrable qui cache milles et un secret. Echo calcule, réfléchit. Echo attends. La brune est patiente, consciente de ses faiblesses, consciente de sa jeunesse. Il lui manque trop pour le moment, la précipitation ne pourrait que lui nuire. Alors elle endure. Un sourire aux lèvres elle endure, la douceur apparente sur ses traits, acquiesçant même parfois au reproche qui lui est fait. Celui d’exister sans représenter cette perfection dont ils aiment tant se vanter. Elle baisse la tête, s’inclinant presque devant leurs moqueries pour mieux cacher la rage qui brille au creux de ses yeux. Et surtout, surtout elle n’oublie pas.

Elle hait avec une intensité inégalée. Il a le goût du sang qui s’attache à son palais, l’odeur du feu qui s’incruste dans son nez. Elle veut les voir brûler. Leur souffrance sera son plaisir. Leur défaite, sa victoire. Aucun d’eux ne mérite sa pitié. Pas même ce frère qu’elle aime tant. L’hypocrite qui embrasse son front, le regard plein d’affection avant de la repousser doucement mais fermement vers les ombres. Il l’aime mais veut la cacher. Il l’aime mais il a honte, un soupçon de dégoût au sein des pupilles sombres. L’éloigne un peu plus pour mieux l’oublier. Et détruit un peu plus chaque fois, celle qu’elle a un jour été.

Elle est si jeune Echo et déjà si amère. Quand les feux de sa colère s’apaisent il ne reste que la lassitude. La haine est épuisante. Elle prend encore et encore et ne laisse derrière elle que des cendres. Mais il ne lui reste pas assez pour pouvoir faire autre chose que de les détester. Claquemurée dans une maison dont les murs ressemblent étrangement à des barreaux de prison. Pour survivre il ne reste plus que la revanche. Si elle lâche prise, ils la briseront tout à fait. Echo deviendra finalement cette poupée sans âme qu’ils auront tout loisir d’oublier. Alors la brune s’accroche. Enlace la rage, se nourrit du dépit. Transforme sa souffrance en une arme brûlante.

Ravale des hurlements qu’elle ne peut laisser échapper.